EDITORIAL


Education nationale :

Le réveil est-il tardif ?

 

Le 12 juillet 2019, le ministre de l’Enseignement supérieur, de la Recherche scientifique et de l’Innovation, rend public le résultat d’une mission d’inspection effectuée dans les structures privées de formation supérieure au Tchad. Verdict : treize seulement d’entre elles sont de bonne qualité et dix-neuf autres doivent fermer parce que ne répondant pas aux normes ! Le 29 août, c’est au tour de son collègue de l’Education nationale d’annoncer le constat établi par son département lors du travail de recensement effectué à N’Djaména entre 2018 et 2019 : sur 1025 établissements privés recensés, 167 doivent fermer ! Sommation est également faite à l’endroit des enseignants fonctionnaires d’arrêter de dispenser des enseignements dans les

établissements privés sous peine de sanctions ; ainsi qu’aux promoteurs de ces structures de recourir aux enseignants fonctionnaires sous peine des mêmes sanctions ! Ce qui laisse augurer le souci d’un meilleur encadrement des élèves tchadiens tant du public que du privé.

Devant le désastre de la baisse de niveau décriée par tous les observateurs de la scène éducative au Tchad, ces mesures sont salutaires. Elles viennent comme une réponse aux préoccupations des parents d’élèves, des structures en quête de personnel qualifié, de toutes les instances soucieuses de l’avenir du pays. Pour faire mentir tous les sceptiques et « tchado-pessimistes » qui disent qu’au Tchad, on prend des mesures sans les mener jusqu’à terme, les autorités tchadiennes sont attendues, comme le maçon au pied du mur, pour qu’enfin s’ouvre une nouvelle ère. Car, il n’est pas à exclure que ces établissements appelés à fermer renaissent sous d’autres formes, dans des endroits différents, avec les mêmes tares, grâce à la bienveillance des services du ministère chargés de donner des autorisations de création d’écoles.

Mais, d’autres épines au pied du système éducatif tchadien sont aussi la résolution du problème de remplacement des enseignants fonctionnaires admis à la retraite, et leur déploiement équitable sur l’ensemble du territoire. Il n’est un secret pour personne que des milliers d’écoles, même publiques, dans le Tchad profond fonctionnent sans un personnel qualifié ou en sous-effectif. De même, les structures d’accueil, malgré les efforts déployés par le gouvernement, restent insuffisantes, mal ou pas du tout équipées et mal réparties selon la carte scolaire du pays. En outre, après plusieurs années de chômage, beaucoup de futurs candidats à l’intégration à la fonction publique pour le secteur de l’éducation auront besoin des mises à niveau pour être vraiment aptes à enseigner. Et la liste des autres formes de dysfonctionnement du système éducatif tchadien n’est certainement pas exhaustive.

L’amélioration de la performance du système éducatif tchadien est l’un des 13 domaines d’attention contenus dans le document de la Politique Nationale de la Jeunesse que votre revue a choisi de vous faire découvrir dans son dossier de ce numéro. Autant les chiffres bruts des taux de scolarisation sont encourageants, autant la qualité de l’enseignement donne à pleurer. Si cette tendance n’est pas corrigée dans les meilleurs délais, il est fort à craindre que le pays recoure à des compétences étrangères, comme au temps de son accession à l’indépendance, pour son développement. Et ce sera plus d’un demi-siècle de perdu.

PAR NESTOR H. MALO