EDITORIAL

Opération « juste prix » : L’aveu d’escroquerie

Depuis le début du mois de mai 2019, une opération appelée « juste prix » a été lancée. Selon ses initiateurs, elle vise à faciliter l’accès aux produits de première nécessité à la grande majorité des Tchadiens. Elle a été placée sous le haut parrainage du président de la République, Chef de l’Etat, Chef du Gouvernement qui, à l’occasion, a déclaré soutenir cette opération afin de permettre aux Tchadiens d’accéder à « au moins un repas par jour ».

Un repas par jour ! C’est la lutte quotidienne de la plupart des populations tchadiennes. L’on regrette cependant que cette initiative soit intervenue si tardivement, après que ces populations ont bien suffoqué sous le poids de toutes sortes de taxes imposées et autres pratiques d’escroquerie mises en place à tous les niveaux par l’Etat, renchérissant du coup les coûts des denrées. Sur les marchés des provinces, sur les routes, et même dans la capitale des fonctionnaires de l’Etat bien identifiés s’illustrent dans l’arnaque des paisibles citoyens. L’initiative « juste prix » a reconnu implicitement que depuis toujours, les Tchadiens subissaient d‘injustes prix !

L’opération ne concerne que quelques produits alimentaires. Pourtant, la base de l’alimentation des Tchadiens c’est aussi et surtout le mil, le sorgho, le maïs, le gombo, l’arachide, etc. La stratégie aurait dû viser à relever la production locale de ces produits pour en faire baisser les prix. Et le Tchad en a les moyens : terres fertiles, plaines inondables, une jeunesse nombreuse et dynamique, etc. Il suffit d’en assurer les conditions. Et la première condition est d’assurer la sécurité et la cohabitation pacifique entre les différentes composantes de la population en milieu rural, grâce à une bonne distribution de la justice, une administration neutre et de développement.

En ce début de la campagne agricole, plusieurs conflits autour de l’espace sont déjà signalés, ayant causé d’énormes pertes en vies humaines. Si, en ville, une lutte sans merci est menée à l’encontre des brigands qui troublent la quiétude des citoyens, les populations rurales attendent ces mêmes actions de la part des pouvoirs publics afin que, grâce à la paix retrouvée, elles se consacrent à leurs travaux champêtres avec le seul souci d’assurer leur alimentation et celle de la population tchadienne.

La deuxième mesure, c’est de faciliter l’accès et protéger les moyens de production des paysans comme la terre et les bœufs d’attelage. « On ne peut pas rassasier sa famille grâce à la générosité du voisin », dit un adage tchadien. Car, malgré les actions que le gouvernement entreprendrait pour assurer la détaxe sur les produits alimentaires, seule une production locale conséquente peut assurer la sécurité alimentaire aux Tchadiens. Payés au « juste prix » pour les efforts fournis pour produire, les paysans assureront le juste prix à la population.

Mais le « juste prix », ce sont aussi le gaz butane, l’électricité, le carburant, le ciment, le sucre, l’eau potable, etc. dont les prix prohibitifs et les pénuries demeurent injustifiables. A cette allure, l’opération « juste prix » s’apparente davantage à un feu d’artifice qu’à une politique de sécurité alimentaire. C’est une pure escroquerie intellectuelle !

Par Nertor H. Malo

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