EDITORIAL


Insécurité à N’Djaména :

On se mord la queue

 

Le 26 février denier, le ministre délégué à Présidence, chargé de la Défense nationale et de la Sécurité publique, prend quelques mesures censées réduire, sinon éradiquer l’insécurité à N’Djaména : interdiction de circulation des motos-taxi au-delà de 23 heures et des voitures aux vitres fumées, interdiction de la mendicité aux ronds points, etc. Du remake du temps du célèbre ex-ministre de la Sécurité publique, M. Ahmat Mahamat Bachir ! Sur les réseaux sociaux, nombreux sont des internautes qui réclament le retour aux affaires de ce dernier qui s’illustrait par sa manière toute cavalière de résoudre des problèmes, alliant brutalité verbale, terreur et fermeté ! Mais ces méthodes ont connu l’effet des feux de paille. Et on les remet au goût du jour. Pour combien de temps ?

Ces mesures ressuscitées par le ministre suscitent des polémiques et même des condamnations. Tant et si bien qu’il n’a pas été établi que les motos-taxis, par exemple, ne sont pas clairement identifiés comme complices dans ces situations d’insécurité. Au contraire, l’on doit les amener à respecter les mesures régissant la mise en circulation des motos-taxi dans la ville de N’Djaména. En outre, lors de l’installation du nouveau Directeur Général de la Police quelques jours plus tôt, le ministre lui-même avait reconnu que l’insécurité qui sévit ces derniers temps à N’Djaména est un problème d’hommes, et non du manque de moyens. Et il sait ce qu’il dit. Les institutions chargées de la sécurité publique (aujourd’hui ordre public) sont truffées d’individus incompétents en la matière, qui s’illustrent davantage par l’appât du gain plutôt que se préoccupés par la sécurité des citoyens. La presse relève régulièrement des scènes de braquage à mains armées se produisant au nez et à la barbe des forces de l’ordre, sans que celles-ci ne lèvent le petit doigt. Par contre, elles sont prêtes à guetter la moindre occasion pour accabler d’honnêtes citoyens d’infractions imaginaires ou de menaces pour leur extorquer de l’argent. Et si elles tombent par hasard sur de vrais malfrats, quelques pièces sonnantes et trébuchantes suffisent à ceux-ci de se défaire d’elles. Ces actes érodent la confiance des populations ne favorisent donc pas la collaboration de la population comme sollicité par les autorités.

L’insécurité est une véritable atteinte aux droits des citoyens de vaquer sereinement à leurs occupations. Et il est du devoir de l’Etat de leur assurer la libre jouissance de ce droit. Il est incompréhensible que l’Etat soit en mesure de circonscrire à la minute près toute manifestation qui « trouble l’ordre public », mais soit impuissante face à la l’insécurité que vivent les citoyens. Déjà, l’un des moyens à sa portée serait de faciliter l’accès régulier à l’électricité aux citoyens des « quartiers difficiles » pour qu’ils éclairent les niches des brigands.  Des endroits que les forces de l’ordre elles-mêmes craignent d’y aller pour préserver leurs vies aussi, disent-elles. Une autre solution est de combattre vigoureusement les pratiques de corruption qui gangrènent l’administration, notamment judiciaire et pénitentiaire. Beaucoup de brigands arrêtés et présentés ces jours-ci par la police et la gendarmerie sont des récidivistes ! Il faut les empêcher de se retrouver dans la rue quand ils doivent séjourner en prison. Les citoyens ne doivent pas faire les frais des errements des pouvoirs publics en matière de sécurité.

 

PAR NESTOR H. MALO